4/Les coptes d’Égypte et le phénomène Zakaria Botros (Partie 4)
Les médias arabes ont longtemps gardé le silence sur le Père Zakaria. Les ulémas d’Al Azhar et d’Arabie ont fait mine de l’ignorer même s’ils suivaient régulièrement ses émissions, espérant le prendre en défaut. Quand tous ces gens réalisèrent sa popularité grandissante ils se décidèrent à réagir. Au lieu de répliques structurées et bien documentées, il eut droit de la part des imams à des attaques personnelles et à des insultes, on l’accusa bien entendu de diffamer l’islam et d’être à la solde d’Israël et des américains. Ses auditeurs musulmans furent vertement critiqués et menacés de l’enfer, des poursuites au criminel furent intentées contre lui et l’Église copte en Égypte sous la contrainte le désavoua. Cette réaction a fourni au Père Zakaria l’occasion d’expliquer en profondeur sa démarche et de déplorer le refus des ulémas de répondre à ses questionnements ; leur refus de débattre est alors décrit par lui comme préjudiciable au public musulman désireux plus que jamais d’être éclairé sur sa religion.
Si, initialement, les imams et les ulémas n’ont mordu qu’à moitié à l’hameçon, en revanche les médias égyptiens se sont laissés prendre; il faut dire que le silence était devenu intenable et certaines questions soulevées par le Père Zakaria ne cessaient de hanter les esprits. L’islam est une religion où le croyant doit se conformer scrupuleusement aux directives sans se poser de questions. Le courant islamiste ayant fortement promu l’observance littérale de l’islam et l’imitation du prophète, des commandements jugés il n’y a pas longtemps comme inappropriés ou inapplicables, ont retrouvé du coup leur pertinence d’antan. Les musulmans d’aujourd’hui doivent par conséquent s’efforcer de rentrer tant bien que mal dans le moule qu’Allah a conçu pour eux et que Mahomet a imposé aux bédouins d’Arabie il y a quatorze siècles.
L’une de ces directives concerne l’allaitement des adultes, l’érudition du Père Zakaria l’a amené à en parler. Selon la logique de Mahomet, une femme ne peut se trouver en présence d’un homme sans déclencher la tentation née du désir sexuel qui par nature est irrépressible, c’est pourquoi la séparation des sexes doit être effective; cependant les circonstances ou les obligations peuvent amener une femme à se trouver régulièrement seule en présence d’un homme. Pour pallier à la situation Mahomet a ordonné que dans ce cas précis la femme doit allaiter l’homme, l’idée est de faire de lui un fils, de cette façon, étant devenue sa mère, elle ne pourra user de séduction à son endroit. Les ulémas des premiers siècles après Mahomet ont renchéri sur cette directive, affirmant que la femme doit donner le sein au moins à cinq reprises à l’homme pour que le lien mère fils devienne effectif.
Au cours d’un programme égyptien d’affaires publiques où l’imam d’Al Azhar était invité, l’animatrice en a profité pour lui demander si l’allaitement des adultes était une directive islamique authentique ou une mauvaise plaisanterie de ce prêtre Zakaria dont tout le monde parle. L’imam lui a répondu qu’effectivement l’allaitement des adultes est une directive islamique authentique. L’animatrice n’a pu alors cacher son désarroi. Laissant de côté toute réserve, elle s’est mise à implorer l’imam : « Que dois-je faire maintenant, je me trouve régulièrement seule avec des collègues masculins, des employés, des chauffeurs, le réalisateur, faudra-t-il que je donne le sein à tous ces gens ? Aidez-moi s’il vous plaît ! » Bien entendu l’imam a esquivé la question.
La controverse prit de l’ampleur, certains soutenaient que cette directive n’est pas authentique, d’autres qu’elle est de toute façon difficile à appliquer. Quelques uns affirmaient qu’elle est aussi valable que cet autre passage des hadiths où Mahomet prescrit l’urine de dromadaire comme un médicament universel. Pour mettre fin à la controverse, le spécialiste et détenteur de la chaire du hadith à l’université d’Al Azhar publia un livre sur le sujet. Non seulement a-t-il soutenu l’authenticité du hadith concernant l’allaitement de l’adulte mais il se permit d’émettre une fatwa à l’effet que toute femme devant se trouver seule avec un homme qui n’est pas son mari ou son frère ou son père a l’obligation de l’allaiter à cinq reprises.
Le livre et la fatwa firent grand bruit, l’affaire fit les manchettes même en Europe, le gouvernement égyptien se trouva fort embarrassé et ne cacha pas son irritation. Les imams d’al Azhar se retrouvèrent dans l’eau chaude, on se moquait partout de l’islam, qui plus est certains hommes fort observants mais également en mal de sexe exigèrent que l’on applique à la lettre le commandement du prophète. Ne sachant que faire, le gouvernement égyptien se sentit obligé de congédier le savant qui a émis la fatwa. Le squelette retourna dans son placard mais le cliquetis des ossements continue de se faire entendre.
Un autre squelette déterré par le père Zakaria ne tarda pas à se manifester, cette fois dans une émission religieuse animée par une jeune femme maquillée avec soin et portant un voile richement brodé.
Deux savants dont le mufti d’Égypte ont été invités à commenter le passage du coran affirmant le droit des hommes à posséder des esclaves sexuelles en sus des quatre épouses légitimes. L’animatrice posa des questions directes aux deux savants : est-il permis d’un point de vue religieux pour un musulman d’aujourd’hui de posséder des esclaves sexuelles comme l’affirme le coran ? Les savants se lancèrent dans des digressions sans fin interrompus sans cesse par l’animatrice leur posant la même question mais sous un angle différent, comme par exemple : « advenant que lors d’une guerre avec Israël des soldats musulmans prennent des prisonniers de sexe féminin, leur est-il permis d’en faire des esclaves sexuelles ? » Soudain le mufti se leva et quitta le plateau sous le regard ahuri de l’animatrice ; il réintégra son siège un quart d’heure plus tard mais resta silencieux par la suite. L’animatrice en guise de conclusion ne put que constater l’impossibilité d’obtenir une réponse franche et encore moins une prise de position conséquente.
Les musulmans se font dire que les paroles d’Allah et du prophète sont contraignantes et voilà que mises à l’épreuve de la réalité elles sont devenues inopérantes ; mais il y a plus, elles ne peuvent de toute évidence être appliquées que dans le contexte d’une société primitive voire barbare. Quelle différence entre l’allaitement des adultes, et l’obligation de voiler les femmes ? Pourquoi la dernière directive est-elle appliquée avec acharnement alors que la première a été interdite ? Puisqu’il est autorisé sans restriction par Allah, pourquoi ne pas réintroduire l’esclavage sexuel ?
Ces questions le père Zakaria les a posées et continue de les poser aux ulémas musulmans. Invités par le public à y répondre, ils finissent par perdre patience et à invectiver ceux qui prêtent l’oreille à « cet ennemi acharné de l’islam » : « ne savent-ils pas que la foi interdit de soulever des questions pouvant susciter le doute dans l’esprit des croyants ? Eux ne daigneront pas à s’abaisser à répliquer à cet individu méprisable! »
Comme pour mieux tourner le fer dans la plaie, le père Zakaria prend un malin plaisir à repasser les passages télévisés où les ulémas ne savent comment cacher leur désarroi ou contenir leur frustration. « Messieurs les ulémas, leur dit-il, vous possédez la science de l’islam, donnez des réponses claires et véridiques au peuple qui vous le demande. Pour ce qui est de vos injures à mon endroit sachez que je vous accorde mon pardon et que je prie pour que Dieu vous éclaire. »
Autre fait remarquable mais qui mérite une explication, il concerne les quatre-vingt dix-neuf beaux noms d’Allah que la tradition a consacrés depuis les origines de l’islam. Ces noms, ou plutôt ces qualificatifs, revêtent une signification particulière pour les croyants. Les répéter ou les calligraphier sur les objets ou sur les édifices est un acte de piété donnant droit à une récompense dans l’autre monde.
Le Père Zakaria lors de ses premières émissions avait attiré l’attention sur certains noms méconnus de la majorité des musulmans au contraire des autres qui, d’usage plus courant, se retrouvent dans les noms et prénoms des gens. Je cite quelques exemples : Abd el Rahman (l’esclave du Miséricordieux), Abd el Karim (l’esclave du Généreux), Abd el Nasser (l’esclave de Celui qui accorde la victoire). C’est ainsi que le Miséricordieux, le Généreux et Celui qui accorde la victoire sont trois parmi les « beaux noms d’Allah » ; ceux-là ne posent pas de problèmes. Il en va autrement d’une trentaine d’autres dont on ne peut soutenir qu’ils sont appropriés à une divinité et encore moins qu’ils sont beaux, comme par exemple el Daar (le Nuisible), el Maker (le Fourbe). Ces qualificatifs donnés à Allah rappellent l’origine païenne de l’islam alors que les divinités pouvaient être bienveillantes ou maléfiques, exigeant qu’on les remercie ou qu’on les apaise.
En réponse aux remarques du Père Zakaria, les ulémas d’Al Azhar et ceux d’Arabie Saoudite sont demeurés un temps silencieux. Mais ils ne sont pas restés inactifs. Multipliant les rencontres et les tractations discrètes, ils accouchèrent d’une « réforme » qu’ils qualifièrent de mineure afin d’en minimiser l’impact sur l’esprit des gens. En tout vingt « beaux noms » ont été retranchés de la liste vieille de quatorze siècles, huit autres sont pour le moment en sursis mais pourraient être éliminés lors d’une prochaine « purge ». Conséquence de cette épuration, les noms jugés non-canoniques devraient être effacés des édifices religieux dont plusieurs sont des monuments historiques. Le Père Zakaria s’adressant aux ulémas leur posa cette question : « les millions de pieux musulmans qui ont invoqué depuis quatorze siècles les « beaux noms » d’Allah, espérant par là mériter le paradis, ont-ils été trompés, leur invocation a-t-elle été vaine ? » Et sur une note plus constructive il les exhorta à poursuivre leur travail et à épurer le coran de tous ses versets haineux et violents.
Autres interventions marquantes qui eurent pour effet d’embarrasser les détenteurs du savoir religieux. La première concerne la généalogie de Mahomet, dont le père officiel est décédé quelques mois après son mariage avec la future mère du prophète. Or il est admis par les spécialistes que Mahomet est né quatre ans après le décès de son père ; d’ailleurs ses contemporains ne se privaient pas de remarques blessantes au sujet de ses origines. Ces faits dévoilés au grand public ont eu l’effet d’un scandale ; dans une société qui carbure à la honte, la seule réaction possible est le déni. D
Dans un effort de « damage control », le mufti d’Égypte a été appelé au secours. Interviewé lors d’une émission d’affaires publiques, il confirma la généalogie officielle de Mahomet, l’animatrice cependant ne se contenta pas d’une telle réponse, « quelle durée accordez-vous à la grossesse ? » demanda-t-elle au Mufti, « médicalement parlant jusqu’à quatorze mois » fut sa réponse. « Est-ce la durée maximale reconnue par la charia ? » Le Mufti répondit : « non, selon la charia la durée maximale est quatre ans ! » On se rappelle qu’au Nigéria une femme ayant accouché trois ans après le décès de son mari fut heureusement sauvée d’une lapidation certaine grâce à cette disposition de la loi islamique.
La seconde concerne le mariage de Mahomet (cinquante-deux ans) avec Aïcha, fille d’Abu Bakr, alors âgée de six ans. Cent quarante neuf références historiques ou tirées des traditions l’affirment, les islamistes bornés en tirent fierté et ne tarissent pas d’éloges au sujet de la «délicatesse» du prophète qui ne s’est pas privé de jeux sexuels dès la «nuit de ses noces» jusqu’à la défloration de la pauvre enfant à l’âge de neuf ans.
Cette histoire révoltante même à l’aune de l’Arabie du septième siècle, est actuellement niée par un professeur d’Al Azhar non sur des bases historiques mais davantage sur des bases éthiques.
D’après lui Mahomet n’aurait jamais commis un acte aussi répréhensible, son mariage avec Aïcha n’est pas nié, c’est plutôt l’âge d’Aïcha au moment de son mariage qui est révisé. S’inscrivant en faux contre tous les documents historiques il l’a « vieillie » d’au moins sept ans se fiant sur des calculs douteux basés sur des postulats sans fondements. L’opinion de ce professeur «négationniste» est toutefois combattue par nombre d’ulémas lesquels ne trouvent rien à redire au comportement du prophète. Allah ne l’a-t-il pas comblé de ses bienfaits ?
La troisième et non la moindre concerne ce qu’un savant musulman éminent a qualifié de « charia des salles de bain » et que le Père Zakaria a appelé d’une manière plus directe la « charia des latrines ». Il s’agit des règles strictes régissant les lieux d’aisance et leur orientation par rapport à la Mecque. On y trouve aussi les directives concernant la manière de pénétrer dans ces lieux secrets, la façon de se soulager, les positions recommandées, le nombre de cailloux nécessaires pour se nettoyer, comment le faire et avec quelle main, les mots qu’il faut prononcer, etc.
Toute une réglementation est par ailleurs réservée aux gaz intestinaux dont l’émission peut invalider la prière.
En effet il est spécifié que les démons lors de la prosternation profitent de l’occasion pour s’introduire dans le rectum provoquant ainsi le relâchement des gaz, la gravité de « l’infraction » étant bien entendu proportionnelle à la quantité de bruit généré. La « charia des latrines » à première vue paraît anodine mais il ne faut pas minimiser la gravité de l’anxiété et de la honte qu’elle génère particulièrement chez les enfants. Elle est de nature à provoquer des désordres émotifs de type obsessionnel. Elle démontre la nature totalitaire de la loi islamique laquelle tyrannise les gens jusque dans leur intimité.
Suite à cette intervention l’éminent savant dont j’ai parlé plus haut s’est manifesté, pour injurier le Père Zakaria dans un premier temps et pour confirmer la pertinence de ses observations par la suite.
Il a aussi déploré « l’esprit paresseux » des musulmans incapables de s’élever au-dessus de ces trivialités, accordant beaucoup d’importance à des futilités au détriment du développement de l’esprit. Selon lui l’emphase mise sur cette « charia des salles de bain » constitue une catastrophe dans la mesure où elle contribue à l’arriération des musulmans. Le Père Zakaria, après lui avoir pardonné ses injures, a fait l’éloge de son courage intellectuel. Dénoncer la charia comporte son lot de risques, même quand il ne s’agit que de la « charia des salles de bain ». Bien évidemment il n’en tient qu’aux musulmans de faire le ménage dans cette charia et, à bien y penser, il serait même préférable qu’ils la mettent au rancart pour de bon.
Peut-on dire que le père Zakaria contribue à faire évoluer l’islam ? L’islam, certainement pas, les musulmans très probablement. L’islam impose aux gens de ne pas réfléchir et surtout de ne pas se fier sur leur propre conscience.
Pour mériter le statut de bon musulman, le croyant doit accepter de se laisser aveugler. Plusieurs acceptent de renoncer à une partie appréciable de leur humanité pour suivre l’exemple du prophète, mais la majorité reste bien en deçà du seuil requis ; non désireuse d’aller plus loin mais néanmoins incapable de remettre en question l’absurdité des commandements. C’est à cette majorité tiède que le père Zakaria s’adresse ; ses émissions qui sont autant de conférences magistrales sur l’islam leur permettent de réfléchir, de douter et de découvrir à la fois la vacuité de l’islam et leur propre vide spirituel.
Le fossé se creuse entre les fanatiques et le reste du peuple, ce fossé le père Zakaria s’efforce de l’élargir tous les jours. En parlant de Jésus-Christ et de l’amour de Dieu, il propose plus qu’une alternative à l’islam, il permet aux musulmans d’établir un lien personnel avec Dieu et de s’approprier leur spiritualité personnelle loin de toute contrainte.
Aux chrétiens d’Occident confrontés au défi de l’islam radical, il offre une perspective encourageante. Le respect dû aux musulmans implique de leur parler en toute franchise et de leur proposer non seulement les avantages matériels de la civilisation chrétienne mais également ses bienfaits spirituels, l’un ne devrait pas aller sans l’autre. L’islam est incapable de répondre autrement que par la tyrannie et la violence aux défis de cette civilisation chrétienne qui est la nôtre. Faute de l’émuler il cherche à la détruire, nous avons le devoir moral de l’en empêcher.