2/Les coptes d’Égypte et le phénomène Zakaria Botros (Partie 2)
On voit émerger régulièrement au cours de l’histoire des personnalités fortes dont l’influence amène des changements majeurs ou précipite le cours des évènements, le Pape Jean-Paul II en est un exemple. Certains peuples semblent voués à une domination perpétuelle : en minorité dans leur propre pays, freinés dans leur élan ou persécutés, ils peinent à se dégager de l’oppression jusqu’au moment où un élément nouveau ou inattendu leur ouvre la voie de l’émancipation. Les coptes possèdent toutes les caractéristiques d’un peuple, ils ont même fondé une civilisation, hélas méconnue, mais qui fait néanmoins partie du patrimoine de l’humanité. Ils ont réussi à survivre malgré quatorze siècles d’oppression islamique.
La révolution dans les communications - internet et télévision par satellite - leur donne enfin l’occasion de créer des ponts virtuels entre eux et le reste du monde. Ils peuvent désormais, sans être noyés dans le sang, brandir la vérité comme une arme et parler vrai à leur oppresseur. Sans l’avoir cherché, ils trouvent dans le Père Zakaria un porte-parole et surtout un porte-étendard.
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Les coptes ont quelques raisons d’être fiers, ils descendent en droite ligne des anciens égyptiens et se considèrent par conséquent comme les héritiers légitimes de la civilisation de l’Égypte pharaonique.
Évangélisés dès le premier siècle, ils tirent également fierté de la place de premier plan qu’occupe leur patrie dans l’histoire du christianisme : la fuite en Égypte de la Sainte Famille peu après la naissance de Jésus ; l’évangélisation de l’Égypte par Saint Marc, auteur du second évangile, disciple de Jésus et compagnon de Saint-Pierre ; le rôle central qu’a joué l’école théologique d’Alexandrie dans l’élaboration de la doctrine chrétienne ; les Pères de l’Église Clément d’Alexandrie, Origène et Saint Cyrille ; les débuts du monachisme avec Saint Antoine et Saint Macaire ; et plus encore, la grande persécution qui, au début du quatrième siècle, a frappé les chrétiens d’Égypte sous le règne de Dioclétien, inaugurant à la fois l’ère des martyrs et le calendrier copte. L’histoire des chrétiens égyptiens est à la fois riche et tragique ; pour eux, le triomphe du christianisme a été de courte durée. La conquête musulmane au septième siècle a inauguré une seconde ère d’oppression, de haine et de persécutions qui n’a jamais pris fin.
Les coptes ont fondé une civilisation dont on parle peu. Elle a brillé de tous ses feux après la victoire du christianisme au quatrième siècle : civilisation chrétienne pour l’essentiel, elle s’est édifiée sur les vestiges des civilisations pharaonique et gréco-romaine, et elle a survécu sous la domination mahométane tant que les coptes ont été majoritaires. La langue copte a été longtemps parlée et écrite et n’a cessé d’être en usage qu’au vingtième siècle. Elle survit toutefois dans la liturgie, un peu comme le latin d’église, et les tentatives de la faire revivre se heurtent à l’opposition violente du gouvernement égyptien. L’art et l’architecture coptes sont conformes à la simplicité du message évangélique ; ils représentent essentiellement des thèmes tirés du livre saint, ce qui n’exclut pas la beauté formelle ni quelque fois la surcharge décorative. La musique copte a survécu dans la liturgie, mais ce sont surtout les tissus coptes et même l’ébénisterie qui retiennent l’attention ; ils détiennent une place plus qu’honorable dans les musées et dans les grandes collections privées.
L’islam des origines ne pouvait se réclamer d’aucune tradition artistique, il n’a pu faire mieux que reproduire les modèles existants dans les pays conquis, l’art copte a donc été asservi au nouveau conquérant.
Les mosquées les plus anciennes d’Égypte contiennent des éléments architecturaux tirés de monuments plus anciens, leur décoration a également fait appel au savoir faire des artistes coptes. Un grand nombre d’objets d’art "islamiques" exhibés dans les musées ont été créés par des coptes.
Quatorze siècles de tyrannie islamique ont laissé des traces indélébiles mais n’ont pas entamé la foi des opprimés ; pour survivre, ils se sont accrochés à l'Église, la seule institution ayant droit de cité. Leur statut était équivalent à celui des juifs : ils ont dû faire allégeance, accepter l’infériorité et servir leur oppresseur, ils ont payé la rançon annuelle, la fameuse jiziah, tout en subissant l’humiliation publique tel que prescrit par le coran.
Quatorze siècles de persécution ont façonné l’âme copte, mais il est utile de souligner que leur foi chrétienne les a empêchés de tomber dans le cercle vicieux de la haine. Désireux d’améliorer leur condition, ils se sont montrés studieux, travailleurs et habiles, cherchant à se rendre indispensables faute de pouvoir prétendre à l’égalité. Leur loyauté et leur pacifisme leur ont permis de jouir de quelques périodes de paix relative dans ce vaste empire musulman du moyen-âge où l’Égypte a connu une certaine prospérité.
Pour les chrétiens d’Égypte, l’islam c’est la doctrine qui fait de leurs compatriotes musulmans des persécuteurs.
La vague islamiste qui inonde le pays a exacerbé la haine et justifié les violences antichrétiennes. Pour l’islamiste, le chrétien est une sorte de rebelle qui s’obstine dans l’erreur, cette obstination est vue comme une provocation légitimant, du point de vue religieux, le djihad, soit la guerre sainte. Les prières du vendredi se terminent régulièrement par une formule de malédiction lancée de tous les haut-parleurs contre les juifs et les chrétiens, les premiers ayant encouru la colère d’Allah et les seconds étant des dévoyés comme il est bien spécifié dans la Fatiha, la sourate liminaire du coran. Plus rarement les traite-t-on de singes et de porcs.
Mais les musulmans d’Égypte, comme d’ailleurs leurs coreligionnaires un peu partout, ont l’épiderme sensible et sont prompts à s’offenser de la moindre peccadille.
Il suffit que les coptes dénoncent en termes prudents les vexations et les violences dont ils sont l’objet pour que les défenseurs indignés de l’islam s’élèvent contre ceux qui cherchent à diffamer la religion de paix et de tolérance. La rengaine est connue, les responsables des violences n’ont rien à voir avec l’islam, ils ont été poussés à bout et n’ont fait que répondre aux provocations. Pour le gouvernement c’est bien entendu le déni total, le sort des coptes ne l’intéresse pas.
L’Église copte a pris le pli de tendre l’autre joue à chaque incident violent. Sa réaction scrutée à la loupe par les autorités et par les islamistes se doit d’être mesurée pour ne pas être interprétée comme une escalade au conflit.
Avant même que les victimes chrétiennes ne soient mises en terre, l’état met en scène la réconciliation générale où mufti et patriarche se serrent la main devant les caméras, un communiqué commun faisant appel à l’unité des égyptiens de toutes les confessions est publié, tout rentre dans l’ordre. Cependant les émeutiers musulmans et leurs instigateurs ne sont jamais arrêtés, la police présente en force durant les massacres se contente de regarder ou porte assistance aux agresseurs, elle n’intervient qu’à la toute fin, non pour porter secours aux victimes, mais pour arrêter les quelques chrétiens qui peuvent encore se traîner malgré leurs blessures.
Les agences de presse étrangères ne se donnent pas la peine d’enquêter sur les incidents violents, le voudraient-elles qu’elles susciteraient immédiatement l’opposition feutrée mais efficace du gouvernement, plus préoccupé de son image sur la scène internationale que de paix intérieure.
Les journalistes occidentaux sont d’ailleurs peu objectifs : de gauche pour la plupart, ils donnent des évènements une image conforme à la vulgate gauchiste et tiers-mondiste ingurgitée à l’université. Leurs reportages jamais publiés en première ou diffusés aux heures de grande écoute, font habituellement état d’accrochages violents entre chrétiens et musulmans comme s’il s’agissait de bandes armées rivales. Le bilan des victimes ne fait aucune mention de leur appartenance confessionnelle, et on s’abstiendra de parler de tuerie ou de pogrome. Les causes des incidents seront occultées, rien ne sera dit au sujet de cette chapelle que les coptes ont tenté de réparer ou de repeindre ou de ce mur de briques que des moines ont entrepris de bâtir autour de leur monastère pour se protéger des brigands. En effet, comment expliquer à un public occidental qu’on veut tenir désinformé, que réparer la porte d’une église en Égypte transgresse un interdit qui remonte au temps des premiers califes et qu’un tel geste est suffisant pour déclencher une émeute et justifier un massacre ?
Peu de journalistes occidentaux se donnent la peine d’informer leurs lecteurs de la pratique courante qui consiste à kidnapper des jeunes filles chrétiennes avec la complicité de la police. Violées et par la suite mariées de force, elles sont tenues éloignées de leur famille. Toutes les démarches entreprises par les proches pour les libérer se heurtent à l’opposition violente des groupes islamistes ; les services de sécurité ferment les yeux ou entreprennent des simulacres d’enquête, généralement la même réponse est donnée : les filles enlevées se sont mariées de plein gré à leurs ravisseurs et ne désirent plus revoir leurs parents.
Le rapt des jeunes filles est dans les faits ouvertement revendiqué par les islamistes comme un droit. En effet, le coran et les enseignements de Mahomet accordent aux croyants qui pratiquent le djihad dans la voie d’Allah le droit de s’approprier les biens des infidèles et de capturer leurs femmes et leurs enfants. C’est de cette façon que les conquérants musulmans se sont constitués des harems et qu’ils se sont enrichis en vendant comme esclaves les captifs tombés entre leurs mains. Les coptes contemporains se trouvent donc à revivre, quatorze siècles plus tard, les heures sombres de la conquête islamique.
Mais ces crimes ne constituent que la pointe visible de l’iceberg. Sous la surface, la persécution imprègne le quotidien des coptes et fait désormais partie de la normalité. La discrimination est enchâssée dans la constitution, la religion officielle du pays est l’islam sans la moindre référence aux racines chrétiennes de l’Égypte malgré la présence d’une communauté copte riche de plus de dix millions d’âmes. Le chef de l’état doit obligatoirement être musulman et la charia est la source du droit. Concrètement, tous les portefeuilles ministériels ou presque sont détenus par des musulmans. Les élections étant truquées, les dix millions de coptes ne peuvent compter que sur une seule députée, encore a-t-il fallu qu’elle soit nommée par le président afin de sauver les apparences. Les règles administratives sont régulièrement modifiées pour bloquer les candidatures coptes aux postes importants de la fonction publique, de la police, de l’armée et des agences gouvernementales. L’infiltration islamiste dans les écoles, les universités, les hôpitaux et les syndicats professionnels est telle qu’il est pratiquement impossible pour un copte d’accéder à un poste de responsabilité.
On est toujours l’enfant ou l’héritier de l’histoire, celle de son peuple ou de son pays. Le Père Zakaria, dès qu’il en a pris conscience, a décidé d’assumer pleinement cet héritage douloureux, animé, non par l’idée de vengeance, mais de la volonté de trouver un sens à quatorze siècles d’épreuves. La civilisation pharaonique dont il est également l’héritier lui a fourni un modèle et transmis le désir de créer une œuvre à l’épreuve du temps. Elle est actuellement en voie de réalisation, une étape importante a déjà été franchie, celle de la libération de la parole contre laquelle la terreur islamiste est impuissante.
Le père Zakaria a défini clairement son approche : depuis plus de sept ans, il s’emploie à retirer un par un les voiles qui recouvrent les visages hideux de l’islam et de son prophète. Chaque émission qu’il anime revêt pour les chrétiens d’Égypte et des pays arabes une signification particulière. Ils ont le sentiment que la peur n’a plus d’emprise sur eux, que symboliquement, ils se libèrent de la tyrannie et de l’humiliation. Pour les soixante millions de musulmans qui suivent régulièrement ses émissions. c’est l’étonnement et bien souvent la consternation face à la vérité, pour d’autres c’est le déni mais pour un grand nombre de téléspectateurs, c’est la désillusion et la remise en question de leur appartenance religieuse. Le Père Zakaria a placé le ver dans le fruit, celui-ci devra conserver son apparence extérieure pour encore un long moment avant que les signes de décomposition n’apparaissent à la surface. Le mur fait d’ignorance, d’oppression et de terreur se lézarde et cessera bientôt de protéger l’islam.
À suivre...