Pourquoi j’ai décidé de quitter la CGT, à laquelle j’appartiens depuis 1974. - Par Pierre Cassen. Préface Gérard Brazon
Publié le 25 Mars 2012
Je ne présente pas Pierre Cassen car chacun sait sur ce blog qu'il est non seulement l'auteur de livres engagés mais aussi le responsable de Riposte-Laïque, un journal en ligne pour lequel je contribue de temps en temps, par quelques articles d'humeur et de rage qu'il me fait l'honneur d'éditer sur le site Riposte Laïque
Je ne le présente pas mais j'aimerais dire tout le plaisir que j'ai eu à faire sa connaissance et le bonheur que j'ai de faire partie de ses amis depuis. A priori, rien ne devait nous permettre de nous rencontrer: militant d'extrême gauche, syndicaliste CGT, il n'y avait guère de chances que nos chemins se rencontrent en dehors d'une manifestation syndicaliste et encore... La CGT n'a jamais été ma tasse de thé. J'ai souvent été en opposition avec elle dans ma carrière de syndicaliste. Humaniste de droite, plutôt bonapartiste façon Consulat, anti communiste, je méprisais les communistes français pour leur aveuglement face à l'horreur des camps de la mort communistes en URSS et ailleurs. Mais Pierre Cassen est un homme d'une grande générosité, d'un humanisme profond, d'un absolu dévouement à la Liberté, à la Démocratie. Quand il m'a offert d'écrire pour Riposte, je n'ai pas hésité une seconde. Par la suite, j'ai découvert un homme d'une profonde honnêteté intellectuelle avec un relationnel ouvert et généreux avec l'autre autant que faire se peut, sans pour autant se laisser déborder. Nous étions, nous sommes encore différents, mais je suis fier d'avoir rencontré un frère d'arme, de plume, parce que nous aimons profondément notre pays. Comme quoi, rien n'est impossible quand la Nation, la France est en danger. Comme nous nous le disons souvent, il sera toujours temps de se différencier sur des sujets moins graves lorsque le danger principal sera écarté. Je sais qu'écrivant celà, je vais le gêner aux entournures, mais tant pis mon cher Pierre, il fallait que je le dise.
Gérard Brazon
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J’ai décidé, après une longue réflexion, de ne pas reprendre ma carte, donc de quitter la CGT, à laquelle j’appartenais depuis 1974. La goutte d’eau qui fait déborder le vase est la tenue d’un meeting intitulé « Pas de printemps pour le racisme », organisé par la CGT et SOS Racisme, avec la présence de Caroline Fourest, celle qui nous a traités de racistes le 18 décembre 2010 parce qu’on alerte sur l’islamisation de l’Europe, Soheib Bencheick (je ne vois pas ce qu’un mufti vient faire dans un meeting syndical) et de toutes les associations dites anti-racistes qui m’ont joyeusement traîné au tribunal, le 3 février dernier, avec mon ami Pascal Hilout, né Mohamed, sous le grotesque prétexte d’incitation à la haine, à la violence ou à la discrimination, etc, etc.
Le combat anti-racisme me serait-il indifférent ? C’est bien évidemment tout le contraire. Parce que le racisme qui, selon moi, consiste à considérer qu’un race est supérieure à une autre pour des raisons génétiques, m’est intolérable, je ne supporte pas qu’on dévoie ce légitime combat, comme le font Sos Racisme et ses compagnons de route depuis des années.
Continuer à cotiser dans une organisation syndicale qui invite ses pires adversaires pourrait paraître schizophrène ou masochiste. Comment pourrais-je encore me reconnaître dans une CGT qui écrit, dans un édito de la revue « Ensemble » signé Francine Blanche (cela ne s’invente pas) : « Du discours de Dakar insultant les Africains à celui de Grenoble stigmatisant les roms, de la circulaire Guéant contre les étudiants étrangers à la liste discriminatoire des métiers ouverts aux migrants, le pouvoir sarkozyste s’enfonce dans la connivence avec le FN et sa « nauséabonde préférence nationale »….
Je n’en peux plus de ce discours, qui cherche surtout à nous faire gober la fin des États-nations, la disparition du peuple français, la société multiculturelle, au service de la mondialisation libérale, que l’Union européenne veut nous faire avaler. Cela n’a rien à voir avec le combat anti-raciste, au contraire. Bien évidemment, n’en déplaise à la candide Francine Blanche, l’immigration accroît le chômage et fait le jeu du capitalisme, en période de chômage de masse, comme le démontrait mon ami Robert Albarèdes, ancien maire communiste de Gréasque. Je persiste, d’autre part, à penser que la préférence nationale est légitime, et qu’elle est historiquement de gauche.
J’ai adhéré à la CGT quand j’étais à l’armée, effectuant mon service dans une imprimerie militaire, et y rencontrant une section syndicale qui m’avait donné envie de rejoindre le syndicat dirigé à l’époque dirigée par Georges Séguy. J’ai fait l’essentiel de ma vie professionnelle en presse parisienne. Je raconte cette expérience, et notamment la transition du plomb à la photocomposition, et la spécificité du monopole syndical de l’embauche, dans un ouvrage écrit avec une journaliste, Isabelle Repiton, « Touche pas au plomb ».
Je n’ai jamais été un syndiqué « béni oui-oui ». Je n’ai jamais supporté, dans ces années, que des militants communistes s’approprient la CGT, dont je pensais qu’elle devait demeurer indépendante de tous les partis, dans l’esprit de la charte d’Amiens de 1906. Lors du coup d’état de la junte polonaise contre le syndicat Solidarnosc, alors qu’Henri Krasucki et la direction confédérale approuvaient la normalisation du Parti communiste polonais, je me promenais, avec d’autres camarades, avec un badge « CGT avec Solidarnosc », ce qui créait parfois quelques tensions… Quand des sections syndicales se permettaient de soutenir la candidature de Georges Marchais, en 1981, quand la direction confédérale, dont le secrétaire était toujours un responsable national du PCF, allaient dans ce sens, je ne restais pas silencieux.
Il faut être reconnaissant à Bernard Thibault, depuis qu’il a pris la direction de la CGT, d’avoir rompu avec ces pratiques, et d’avoir ouvert la CGT et des postes de direction à d’autres composantes, tournant ainsi le dos à des pratiques sectaires du passé.
Pour autant, comment ne pas constater, depuis plusieurs années, que les propos de Jacques Philarchein, prononcés le 18 décembre 2010, aux Assises de Charenton, s’appliquent parfaitement à ce qu’est devenue la CGT.
Il existe en France (et ailleurs) un véritable marché du misérabilisme, qui produit ses prophètes et distribue ses prébendes. Des plumitifs en mal de notoriété, des auteurs ou éditeurs cherchant à vendre, des chercheurs et des sociologues qui veulent des crédits pour leurs travaux, des cadres d’associations antiracistes grassement subventionnés (même chose pour des institutions comme la Halde), des comédiens bobos qui jouent les engagés pour se fabriquer une image, bref toute une faune intellectuelle, artistique et militante qui a un intérêt matériel au développement de l’angélisme.
A noter d’ailleurs que cette faune a parfaitement bien infiltré les partis et les syndicats, au point d’en faire des courroies de transmission de leur idéologie. Cette bohème misérabiliste s’est imposée à l’intérieur des vieilles structures politiques et syndicales du mouvement ouvrier, et non pas l’inverse.
Pour confirmer les propos de Jacques Philarchein, systématiquement, la CGT demande la régularisation des clandestins. Pourtant, cela lui a valu quelques ennuis, puisque son service d’ordre avait du utiliser la forcecontre des « sans papiers » qui occupaient depuis plusieurs mois la Bourse du Travail de Paris, suscitant par ailleurs, y compris en interne, la réprobation des gauchistes et de la bobocratie.
J’ai constaté que la CGT défendait le voile dans l’entreprise, puisque cela était son avocat, Maître Henry, qui défendait la salariée voilée de la crèche Baby Loup de Chanteloup, dont les amis islamistes avaient monté une section syndicale CGT.
J’ai constaté que le SNJ-CGT demandait le licenciement d’un journalistetravaillant dans le service public, Éric Zemmour, condamné à cause de SOS Racisme, suite à un véritable procès en sorcellerie.
J’ai constaté que la CGT finançait des opérations pour un Bateau pour Gaza, et donc soutenait les fascistes du Hamas, dont la charte appelle à l’extermination de tous les Juifs.
J’ai constaté qu’à Air France, la CGT implantait un restaurant d’entreprise spécifiquement halal, favorisant le communautarisme. J’ai constaté que dans les usines automobiles, des salles de prières s’implantaient. J’ai entendu le syndicaliste FO Carl Pincemin, entendu par la mission Gerin, parler, aux Assises sur l’islamisation, de la montée des revendications religieuse dans nos entreprises, principalement dues à l’islam, sans entendre Bernard Thibault réagir.
J’ai constaté qu’à Clermont-Ferrand, quand des voyous saccagent la ville, agressent des policiers, et des manifestants scandent « allah akbar » devant la préfecture, la CGT locale joint sa voix à celle de la LDH pour demander la suspension des deux policiers, jetant gratuitement la suspicion sur deux fonctionnaires jetés en pâture à l’opinion publique.
Toutes ces initiatives, qui n’ont rien à voir avec la défense des intérêts moraux et matériel de TOUS les travailleurs, m’ont profondément exaspéré, mais je continuais à cotiser car, bien que n’exerçant plus d’activité professionnelle, je tenais à soutenir ceux qui ont besoin d’un syndicat fort pour les défendre. Cette journée du 21 mars sera le coup fatal porté à mes bonnes intentions. En effet, loin d’être un outil de lutte contre le racisme, cette initiative de la CGT est très politicienne, et sert à justifier la propagande contre la préférence nationale, qualifiée de raciste, et la campagne que la confédération mène, depuis l’affaire deFabien Engelmann, ce syndicaliste CGT exclu pour être passé de NPA au Front national.
Sous Séguy-Krasucki, la CGT roulait ouvertement PCF, sous Thibault, elle viole autrement la charte d’Amiens, en menant une croisade contre le Front national, oubliant, quels que soient les divergences qu’on peut avoir avec ce parti, que 40 % d’ouvriers (dont forcément des cégétistes) déclarent vouloir voter pour sa candidate.
Amalgamer aujourd’hui la préférence nationale à du racisme est aussi crapuleux que qualifier, hier, de fasciste, quiconque dénonçait le goulag en URSS. Défendre, en période de chômage de masse, une politique migratoire catastrophique pour les travailleurs français et étrangers, comme le font Bernard Thibault et la direction confédérale, fait le jeu du Medef, et trahit les intérêts des salariés. S’aligner systématiquement sur le terrorisme intellectuel que font régner Sopo et ses complices ne participe en rien à la défense des intérêts matériels et moraux des travailleurs, ce qui devrait être la première mission des organisations syndicales.
Je n’ai pas oublié par ailleurs que Bernard Thibault et quelques dirigeants de la direction confédérale étaient favorables au « oui » au TCE, en 2005. C’est la pression de la base, et de cadres intermédiaires, qui les ont empêchés de persévérer, du moins officiellement, dans cette orientation européïste. Il y a une cohérence, à la direction de la CGT, à être favorable à un traité qui faisait la part belle à la concurrence libre et non faussée, et à défendre une politique migratoire en période de chômage de masse. Laurence Parisot dit la même chose, et réclame des frontières ouvertes. Mais il y a aussi une cohérence, pour des militants qui, comme moi, ont défendu le « non », à exiger des mesures protectionnistes contre l’immigration, comme le faisait la CGT des années 1930, au nom de la défense des salariés français ou étrangers en recherche d’emploi. Il n’y a pas de troisième voie, il y a une logique, ou une autre.
Je tourne donc une page, ouverte il y a 38 ans, sans regret aucun. Je garde de formidables souvenirs de ces années militantes, et notamment la valeur de nombre de camarades rencontrés, leur sens de l’amitié, du dévouement, de la solidarité, de la tolérance et de l’humanisme. Je n’oublie pas, pour rester lucide, le sectarisme et parfois les attitudes haineuses de certains autres, dont je me félicité qu’ils n’aient jamais accédé à des postes de pouvoir plus élevés. Je continuerai à voir les premiers, et j’ai oublié depuis bien longtemps les autres. Je reverserai une cotisation à la CGT quand elle aura retrouvé des pratiques républicaines et laïques, et l’esprit de Jaurès, qui disait que la Nation était la seule richesse des pauvres. Avec des dirigeantes contre Francine Blanche, je risque d’attendre encore longtemps…
Pierre Cassen