Les mariages forcés n'épargnent pas le Limousin
Publié le 28 Novembre 2011
Nana Camara milite activement au sein du Groupe pour l'abolition des mutilations sexuelles féminines (Gams). À Limoges, elle est venue parler de la problématique des mariages forcés. Un phénomène qui n'épargne pas la région.
Nana Camara est installée à Paris où elle oeuvre pour le Gams depuis plusieurs années. Cette Fédération nationale dispose de six antennes en France, mais pas en Limousin.
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Pourquoi vous êtes-vous lancée dans ce combat ?
J'ai connu plusieurs filles dans mon entourage qui ont été maltraitées. J'ai moi-même été confrontée à ces problèmes dans mon pays d'origine, le Mali. Mes fonctions d'éducatrice au sein de la Fédération Gams m'amènent régulièrement à rencontrer des victimes, ou à exposer nos actions dans toute la France.
Les mariages forcés sont-ils une réalité en Limousin ?
La problématique est identique en milieu rural ou urbain. C'est un phénomène très répandu et il y a, bien sûr, des cas de mariages forcés en Limousin. C'est la première fois que je viens dans la région et c'est difficile de donner des chiffres, surtout quand personne n'ose parler.
Certaines communautés sont-elles plus concernées que d'autres ?
C'est un phénomène qui concerne en majorité les populations issues de l'immigration. Elles viennent du Maghreb, d'Afrique, de Turquie ou des Comores. Les familles savent que cette pratique pose problème en France, mais il s'agit de leur culture. Et les enfants qui sont nés ici ont du mal à accepter que l'on puisse décider pour eux.
Pourquoi les parents perpétuent cette pratique du mariage forcé ?
Les familles parlent de mariage arrangé. Cela n'a rien à voir avec la religion. Les parents ne souhaitent pas voir leur fille perdre sa culture en se mariant avec un homme issu d'une autre communauté. Il y a aussi un paramètre financier. Les parents préfèrent marier leur fille à un cousin plus riche pour que leur patrimoine ne soit pas dispersé. Les mariages arrangés représentent une véritable tradition.
Comment pouvez-vous lutter contre ces problèmes ?
Nous incitons les assistantes sociales à rencontrer les familles concernées. Nous prévenons les services de police lorsque les filles sont mineures. Certaines n'ont que 12 ans... Souvent la famille accepte de revenir sur sa décision mais il arrive que ce soit le chef de la communauté qui décide. Il s'agit souvent d'un oncle ou d'un grand-père. Dans ce cas, nous essayons de les retrouver mais c'est compliqué. Le principal risque est pour les victimes. Elles n'ont souvent que la rébellion ou le suicide comme solution.