La parodie de combat de la Saoudienne Shahrkhani
Publié le 4 Août 2012
NV
La jeune fille de 16 ans, première à participer voilée à un tournoi de judo, a traversé la compétition olympique comme un zombie.
La parodie de combat aura duré une minute et quarante secondes, le temps pour la Portoricaine Melissa Mojica d’administrer – à deux à l’heure – un ippon sur sa toute première attaque de la journée. La Saoudienne Wodjan Shahrkhani, première judokate voilée à participer à un tournoi de judo (olympique ou pas), n’a pas pesé lourd. Une sorte de malaise a même saisi les présents. Un entraîneur : «Cette fille n’a jamais fait de judo de sa vie, ce n’est pas possible autrement. A croire que la Portoricaine était dans le coup.»
On résume : la Fédération internationale de judo interdit le port du voile en compétition pour raison de sécurité. Le Comité international olympique tenait à avoir des athlètes féminines saoudiennes pour des raisons géopolitiques. Le père de Shahrkhani a exigé que sa fille porte le voile sur le tatami. On arrive à un compromis surréaliste : OK pour le voile, mais s'il tombe dans le feu de l’action, interdiction de le remettre.
Juste avant son combat (un bien grand mot, donc), la jeune fille (16 ans) et son coach se sont longuement fait expliquer le protocole par une personne de l’organisation. Las : Shahrkhani a bifurqué trop tôt sur le tatami, se faisant reprendre in extremis par un volontaire. Après son combat en bois, la Saoudienne est tombée dans les bras de son père et a fondu en larmes.
C’est peu dire qu’elle était attendue par la presse : une centaine de journalistes, là où un champion olympique en attire une trentaine après son titre. Elle a traversé la zone mixte sous bonne escorte et comme un zombie : le regard fixe d’une aveugle. Un responsable saoudien s’est arrêté pour lâcher trois phrases : «Elle est fière d’être là. Elle était prête à combattre. Elle remercie tout le monde.» On a plutôt eu l’impression qu’elle n’y comprenait rien. Vainqueur de son 8e de finale dans la foulée, le Français Teddy Riner, quintuple champion du monde et star objective du jour, est passé dans son dos. Pas un journaliste n’a eu un regard pour lui à cet instant