L’Union européenne et le FMI s’approcheraient-ils de la vérité ?

Publié le 25 Février 2012

Tribune libre de Frédéric Delambre, économiste bancaire

Un rapport confidentiel de l’UE et du FMI, en date du 15 février et récemment publié par l’agence Reuters, montre à quel point le système croit de moins en moins aux solutions ruineuses et désespérées qu’il essaie de mettre en œuvre.

Quelle est la situation ? Le nouveau plan d’aide à la Grèce, négocié à l’arraché, fait passer l’aide reçue par ce pays de 130 milliards d’euros à 237 milliards d’euros, soit un quasi-doublement… avec un objectif pour 2020 inchangé (et même augmenté de 0,5 % !), celui d’un taux d’endettement de 120,5 % du PIB – situation identique à celle de l’Italie d’aujourd’hui, dont les difficultés se passent pourtant de commentaires. Une politique qui, en peu de temps, doit doubler les moyens qu’elle entend mettre en œuvre pour viser, au terme d’une décennie d’austérité, le même objectif calamiteux, mérite réflexion… Il est intéressant d’observer que le système y vient lui même, puisque le document cité envisage diverses hypothèses dont chacune consiste en l’échec d’un élément donné du plan d’aide : difficultés sociales ou inertie bureaucratique, solde budgétaire légèrement en-deçà des objectifs ambitieux (excédent budgétaire primaire – soit avant déduction du paiement des intérêts de la dette – de 2,5 % du PIB) du plan, croissance inférieure à 1 %, taux d’intérêt supérieurs aux attentes, recettes des privatisations moindre que prévu… La prise en compte d’une seule de ces hypothèses défavorables porte le taux d’endettement en 2020 entre 135 % et 148 % du PIB, soit un quasi-piétinement après, répétons-le, des années de lourds sacrifices imposés au peuple grec, mais aussi à l’ensemble des contribuables européens ; l’UE et le FMI envisagent d’ailleurs purement et simplement un retour de ce taux à son niveau actuel de 160 % du PIB !

Voilà qui s’appelle un jeu perdant-perdant : tel est le jeu de l’euro – depuis sa préparation d’ailleurs qui, pour la France, se solda par la perte d’un million d’emplois au milieu des années 1990.

« Il y a une tension fondamentale entre les objectifs du plan [d'aide] de réduire la dette d’un côté et d’améliorer la compétitivité de l’autre, dans la mesure où la dévaluation interne requise pour restaurer la compétitivité de la Grèce conduira inévitablement à un ratio dette/PIB plus élevé à moyen terme », reconnaissent l’UE et du FMI.

« Dévaluation interne » signifie bien sûr ici politique de déflation, expression que le système évite d’utiliser car elle a mauvaise presse depuis les échecs cuisants de ce type de politiques dans les années 1930. Les effets d’une austérité implacable risqueraient donc d’être voisins des effets redoutés d’une dépréciation du change, réputée aggraver la dette publique ? Il ne reste plus qu’à conclure (ce que l’UE et le FMI se gardent bien de faire) que, face à des risques du même ordre (pour s’en tenir au discours officiel très pessimiste sur la dépréciation du change, qui vise à présenter la sortie de l’euro comme un mal absolu quel que soit le pays concerné), la dépréciation du change qu’entraînerait pour la Grèce un passage de l’euro monnaie unique à l’euro monnaie commune, permettrait à ce pays un redressement relativement rapide et indolore de sa compétitivité, car elle ne réduirait de manière immédiate le pouvoir d’achat qu’en regard des produits importés, et non (ou fort peu, pour prendre en compte le cas des produits nationaux à fort contenu d’importations) en regard de la production nationale.

Rédigé par Gérard Brazon

Publié dans #Europe liberticide

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