Journalisme en France. “Une cécité qui confine au déni du réel” par Élisabeth Lévy
Publié le 27 Mai 2011
Les choses évoluent : vous êtes désormais nombreux à pourfendre la “pensée unique”…
J’essaie d’éviter ce lexique du politiquement correct car on est toujours le rebelle ou le conformiste d’un autre. Je ne sais pas si vous faites allusion à ceux que presque toute la presse a dénoncés comme “nouveaux réacs” mais je suis ahurie que personne n’ait perçu le caractère cocasse et même ubuesque de cette chasse aux sorcières.
D’éminents journalistes ont très sérieusement expliqué que le paysage médiatique était envahi et le peuple perverti par une troupe maléfique de cinq ou six personnes qui, avec leurs petits bras, auraient plus d’influence que toute la profession réunie. Puissants et omniprésents ? De qui se moque-t-on ? Pour ma part, je suis sur RTL et sur France 2 une fois par semaine – et l’émission de Franz-Olivier Giesbert s’arrête ce vendredi. S’étonne-t-on d’entendre quotidiennement Jean-Michel Aphatie, Alain Duhamel – pour qui j’ai beaucoup de respect et qui se trouve être l’un des rares à aimer le désaccord intelligent – et bien d’autres ? Même Grazia s’y est mis avec un article intitulé « Faites-les taire ! », gracieusement illustré par nos photos en train de brûler – au nom de la tolérance bien sûr. Étrange conception du pluralisme.
Que vous reproche-t-on ?
Entre autres méfaits d’avoir, en propageant des idées “rances”, poussé les Français dans les bras du FN. Peut-être mes éminents confrères devraient-ils se demander pourquoi les merveilleuses leçons de morale qu’ils dispensent depuis des années sont sans effet. Nous serions “populistes”, accusation amusante quand le Nouvel Obs inaugure sa nouvelle formule par une couverture sur les riches, proclamant : « Ils ont tout ». Je ne détiens pas la vérité mais j’essaie d’argumenter, alors qu’on réponde à mes arguments au lieu d’instruire des procès en mauvaise pensée.
Propos recueillis par Fabrice Madouas